Notules et Sentences
(Tirées du Barddas)
1°) Rien n’est véritablement caché, que l’Inconcevable.
Rien n’est inconcevable, que l’Incommensurable.
Rien n’est incommensurable que Dieu.
Et il n’y pas de Dieu, que l’Inconcevable.
Rien d’inconcevable que ce qui est réellement caché.
Et rien de vraiment caché que Dieu.
2°) Nul Dieu, sinon l’Inconcevable.
Rien d’inconcevable que Dieu.
Nul Dieu, sinon l’Incommensurable.
Rien d’incommensurable que Dieu.
3°) « Je suis Homme, par le privilège du Vouloir Divin. Car ce que Dieu veut, est. Je vins du Macrocosme, et mon origine fut ANWN. Je suis maintenant dans le Macrocosme, où je vins à travers le Cercle d’ABRED. Et maintenant, je suis un Homme près de son terme.
« Auparavant, j’étais en ANWN, l’Abîme, la moindre particule de Vie qu’un puisse concevoir, et le plus près possible de la Mort absolue. Puis, je suis passé dans chaque forme d’existence, et à travers chaque forme où il était possible que soient le Corps et la Vie.
« Je suis venu jusqu’à l’état d’Homme, au long du Cercle d’ABDRED, où pénible et vide fut ma condition à travers les Ages, depuis mon dégagement de la Mort dans l’Abîme. Et cela, par la grâce de Dieu, sa grande Bonté et son infini Amour.
« A travers chaque forme susceptible de renfermer la Vie, dans les eaux, dans les airs, dans le ciel, j’ai enduré rigueurs et tourments, mal et souffrance, et petites et mince furent mes joies, jusqu’à ce que je devinsse Homme.
« Car, si on n’a vu et connu toute chose, le GWENVED demeure inaccessible ; et on ne peut voir et connaître nulle chose si on n’a souffert. Il ne peut y avoir d’Amour, complet et parfait, qui ne confère le pouvoir d’acquérir la Science menant au GWENVED. Car, le GWENVED ne saurait être sans la Connaissance complète de toute forme d’existence, de toute souffrance, de toute joie, de tout mal et de tout bien.
« Or, il n’est de science qui ne s’acquière sans l’épreuve de chaque forme de Vie, de chaque vicissitude, de chaque douleur. Et ces connaissances dérivent les unes des autres. Et tout cela est nécessaire avant que le GWENVED ne soit enfin possible ; et nécessaire avant d’arriver au total Amour de Dieu. Tout comme le complet Amour de Dieu est nécessaire avant d’atteindre le GWENVED.
« Sans le triomphe sur le Mal et sur la Mort, sur tout obstacle comme sur tout principe de Destruction, il ne saurait être de vie en GWENVED. Et on ne saurait triompher des maux sans connaître leur espèce, leur nature, leur puissance, leur action, leur situation, leur temps, leur forme et manière d’être. On ne saurait les vaincre sans connaître les énergies à leur opposer pour les défaire. Ni l’amélioration à en retirer, ni la victoire qu’on peut remporter sur eux.
« Là où est ce point de parfaite Connaissance, est la parfaite Liberté. Et il ne saurait être de délivrance du Mal, ni de victoire sur la Mort, que là où se trouve cette Liberté parfaite qui contient le GWENVED…
« Parce qu’il n’y a nulle identité entre deux formes de Vie, il ne peut exister de science parfaite sans la traversée de chaque état. En chacun d’eux, sont une cause, une souffrance, une science, une compréhension, une félicité, une condition, une action, une victoire. Et tout cela ne saurait se trouver dans une autre quelconque forme d’existence.
« Et comme il n’y a dans toute forme de vie une expérience spéciale, impossible en aucune autre, il faut passer dans chacune d’elle pour connaître chaque expérience d’espèce et d’intelligence, et, par suite, vaincre tout mal et acquérir tout bien.
« Or, il y a autant de formes d’existence et de vie que Dieu l’a jugé nécessaire pour la recherche et la connaissance de tout mode de bien et de mal. Car Dieu ne connaît et ne conçoit rien qui puisse être acquis à l’expérience puis à la connaissance. Et en toute chose où puisse résider une science du Bien et du Mal, de la Vie ou de la Mort, se trouve une forme d’existence correspondant à l’acquisition de cette science ! D’où vient que le nombre des espèces et des modes de vie est celui qui peut être conçu et compris comme nécessaire à la possession entière du Bien, de la Science et de la Joie.
« Et Dieu a voulu que tout Vivant et être animé traversât toute forme et espèce douée de Vie,
Afin que tout Vivant finisse par posséder complètement la Science, la Vie, la Joie éternelle. Et tout cela par le parfait Amour que porte Dieu à tout être vivant.
« Parce qu’on ne peut mieux espérer ni moins espérer que l’Infini Amour de Dieu, tout être vivant parviendra finalement au Cercle du GWENVED. Après avoir traversé le Cercle d’ABRED depuis la profondeur d’ANWN qui est l’extrême limite inférieure de chaque existence animée, l’être monde de l’Abîme de plus en plus haut sur l’échelle de la Vie. Jusqu’à le condition humaine qui lui permet de s’affranchir d’ABRED et de sa Nécessité. Alors par l’union avec le Bien, et par la Mort, on passe dans le Cercle de GWENVED, où d’ABRED mortel finit à jamais… Et il n’est plus nécessaire de retraverser chaque forme d’existence, sinon librement et volontairement.
« Mais ne va au Cercle de GWENVED, que l’être qui, durant sa Vie, s’est attaché au Bien, à la Sagesse, à chaque œuvre de Justice et d’Amour. Alors, quand l’emportent ces mérites sur leurs contraires, la Déraison, l’Injustice, la Dureté de cœur, l’Homme va au GWENVED après sa mort. Et il échappe au Cercle d’ABRED, parce que le Bien a enfin triomphé du Mal, et que la Vie a dominé la Mort pour toujours. Alors, il s’élèvera de stade en stade, jusqu’aux extrêmes limites du parfait GWENVED, où il s’établira pour l’Eternité.
« Au contraire, l’Homme qui s’est attaché à l’Indifférence, à la Déraison, à l’Erreur, retombe de sa vie en ABRED à une autre vie en ABRED, mais en une forme d’existence conforme à ses désirs, adaptées à ces tristes affinités. Puis, il remontera, selon qu’il se sera attaché à la Sagesse, vers la condition d’Homme. Il montera au GWENVED, ou retombera en ABRED à sa mort. Et il y retombera toujours ainsi, jusqu’à ce qu’il consente à pratiquer le Bien et à s’y maintenir.
« Là où se trouvent le moins possible d’âme et de vie, où la Mort est la plus profonde (et ce
Indépendamment de toute manière d’être), là est ANWN, l’Abîme primordial.
« Là où est la légèreté, la lumière, la chaleur, l’incorruption, l’invariabilité, se trouve la Vie. Là où se trouvent la pesanteur, le froid, les ténèbres, la corruption, là est la Mort.
« Il y a trois choses qu’on peut concevoir en Dieu. Savoir : son Origine, car il ne peut y avoir nul temps où il n’ait pas existé ; la grandeur de son Amour, car quelque immense que soit son Œuvre, il ne verra jamais de terme à ce qu’il peut justement accomplir ; et enfin son Pouvoir, car il n’y a aucune fin, aucune borne ou mesure, à ce qu’il peut faire, au-delà de tout ce qu’on peut imaginer.
« Dieu est à la fois la Vie, complète et parfaite, et le total anéantissement de la Mort.
« Dieu est la Vie, pleine et entière, impérissable et sans fin. Dieu est le Bien absolu, destructeur de tout mal. Dieu est le Pouvoir absolu, exclusif de toute impuissance. Dieu est la Sagesse et la Connaissance absolues, anéantissant toute ignorance et toute folie.
« CYTHRAUL est la Nuit, ténèbres des ténèbres, l’impuissance privée de tout capacité. CYTHRAUL est dépourvu de toute volonté ; créature de Nécessité et non de Vouloir ; sans être ni vie ayant rapport avec l’existence et l’individualité ; vide comme le Vide, mort comme la Mort, nul comme le Néant.
« Et, par ce qui précède, on comprend qu’il nr puisse exister à l’origine que Dieu et CYTHRAUL, l’Etre et le Non-Etre, la Vie et la Mort, la Lumière et les Ténèbres.
« Dans l’Abîme d’ANWN, les âmes ne possèdent de la vie ou du bien que le degré le plus infime. Et de la mort et du mal, elles ont le degré le plus élevé qu’il puisse y avoir. D’où vient qu’elles sont essentiellement mauvaises, par suite de cette prépondérance du Mal sur le Bien. Et c’est à peine si elles vivent et existent, inconsciemment parfois.
« Et la durée de leur forme est nécessairement courte, tandis que par la dissolution, née de la Mort, elles avancent et progressent graduellement vers un plus haut degré de Vie de plus en plus rapprochées de la Vie et du Bien Suprême. Durant ce périple de formes en formes. Dieu, en sa miséricordieuse affection pour tout être vivant les guide au long du Cercle d’ABRED, poussé par l’Amour Infini qu’il leur porte. Et cela jusqu’à l’état d’Homme, là où Bien et Mal s’équilibrent, aucun ne l’emportant sur l’autre, hormis par le choix de la créature.
« Alors apparaissent la Liberté, le Discernement, le Pouvoir de Choisir, et l’Homme se dirige librement vers le Mal ou le Bien.
« Au-dessous de l’état d’Homme, en ABRED, les êtres vivants sont nécessairement mauvais (imparfait), enclins au mal, par manque complet de volonté et de pouvoir, devant la puissance du Mal. Car leurs moyens varient, selon le niveau atteint en ABRED.
« Pour cette raison Dieu ne les hait point ni ne les punit, mais bien au contraire, il les aime et les chérit. Car, par leur soumission au Destin qu’il leur impose, par leur manque absolu de volonté et de choix, ils ne peuvent être autrement. Quel que soit l’envahissement intérieur du Mal, ils n’y peuvent remédier, se trouvant ainsi en cet état par la Fatalité et non par la Choix.
« J’ai été marqué par Math, la Nature, avant de devenir immortel. Pour faire de mon âme animale une âme humaine, Gwion a versé sur mes lèvres le Breuvage d’Immortalité que contient la Coupe dont il a la garde. La Coude de KARIDWEN, la Mère-Divine.
« Mon pays d’origine est la région des étoiles d’été. Le Distributeur des Mondes m’avait près de Son Trône, dans la galaxie primitive, et je suis une merveille dont l’origine n’est pas connue ! J’ai été en Asie, avec Noé, dans l’Arche. J’étais dans l’Inde quand Rome fut bâtie. J’ai accompagné ici les survivants de Troie. Je serai ; jusqu’au Jour du Jugement, sur la face de la terre, et je suis capable d’instruire un univers entier… Idno et Heinin me nommaient Merlin, mais les rois de l’avenir m’appelleront Talièsin…
Variante de ce texte :
« Existant de toute éternité dans les océans, et depuis le jour où le Premier Cri s’est fait entendre, nous avons été projetés, décomposés, simplifiés, par les rameaux du Bouleau (1). Quand ma création fut accomplie, je ne pris point naissance d’un père et d’une mère, mais des Neuf Formes Elémentaires (2) du Fruit des Fruits du Dieu Suprême, des fleurs de la montagne, des fleurs des arbres et des arbustes.
« J’ai été formé par la Terre, par les fleurs de l’ortie, par l’eau du neuvième flot. J’ai été marqué par Math, avant de devenir immortel ; j’ai été marqué par Gwyddon, par le Sage des sages ; je fus marqué dans le Monde primitif, au temps où je reçus l’existence. J’ai joué dans la Nuit, j’ai dormi dans l’Aurore ; j’étais dans la Barque, avec Dylan, embrassé entre ses genoux royaux, lorsque les Eaux semblables à des lances ennemies tombèrent du Ciel dans l’Abîme.
« J’ai été serpent tacheté sur la montagne, vipère dans le lac, étoile chez les Chefs supérieurs. J’ai été dispensateur du liquide, revêtu des habits sacrés, et tenant la Coupe. Il s’est écoulé bien du temps depuis que j’étais pasteur. J’ai longtemps erré sur la terre avant de devenir habile dans les sciences. J’ai erré, j’ai circulé, j’ai dormi dans cent Cercles, et je me suis agité dans cent vies…
- Les « rameaux du bouleau », arbre consacré à Karidwen, la Nature-Eternelle, sont ici l’image des mille et une possibilités de celle-ci. Tailièsin enseigne ici les modalités multiples de l’émanation (se faisant à travers le canal des formes naturelles) du Man Red, le « germe de lumière » primordial.
- Les Neuf Formes Elémentaires sont les neuf « nombres », véritables régents de l’Univers et de la Vie. Talièsin enseigne ici que le principe qui présida à l’émanation de l’homme ne fut point celui d’un couple primitif, créé ex nihilo, mais bien le résultat d’une action créatrice transcendentale des régents que sont les « Nombres-Dieux ».